La fidélisation des collaborateurs expatriés passe (aussi) par la gestion de leur retour

APRIL minds

16 janvier 2019

Avec la signature de l’accord sur le Brexit mi-novembre, 13% des expatriés français installés au Royaume-Uni envisagent de revenir en France [1]. Si la situation économique et politique n’est pas encore stabilisée, ces velléités de retour au pays des expatriés vont poser de vraies questions à leurs employeurs, et dans un laps de temps sans doute assez court.

 

Le Brexit pose la question du retour des collaborateurs expatriés à leur pays d’origine avec une acuité particulièrement forte. Le retour est souvent le maillon faible de la gestion de l’expatriation par les employeurs, convaincus que le fait de rentrer chez soi est, sinon un non-événement, en tous cas forcément facile pour le collaborateur. C’est faux, comme en témoigne ce chiffre éloquent : 47% des expatriés ont quitté leur entreprise dans les 2 ans qui ont suivi leur retour [2].

 

Le processus d’expatriation s’étend de la préparation du départ du collaborateur qui s’expatrie jusqu’à l’accompagnement de son retour à son pays et son entreprise d’origine ; et cette dernière étape est incontournable pour maintenir son engagement et le fidéliser, alors qu’il est souvent devenu un véritable atout pour son entreprise. La plupart du temps, il revient en effet bilingue, doté d’un réseau professionnel plus international, et démontre une agilité et une capacité d’adaptation accrues, ce qui sont autant de forces clés pour une entreprise, a fortiori sur un marché en constante mutation, toujours plus digital, plus international et plus concurrentiel.

 

Comme pour la préparation au départ, la gestion du retour d’un collaborateur expatrié doit s’inscrire globalement dans la politique de gestion des talents de l’entreprise et tourner autour de trois axes :

• L’accompagnement professionnel: quel poste ? quelle valorisation des nouvelles compétences / connaissances acquises ? comment retrouver une dynamique dans son entreprise sans l’effet « grisant » de la vie à l’étranger ?

• L’accompagnement administratif: où se loger ? comment déclarer ses impôts ? comment s’inscrire aux régimes d’aides sociales ? quelle couverture santé ? Ces questions administratives se posent particulièrement en France, où les  formalités sont nombreuses et longues : obtention d’une nouvelle carte vitale, présentation d’une attestation  complète de la couverture dont le collaborateur bénéficiait à l’étranger…

• L’accompagnement social: c’est souvent un volet négligé, or le collaborateur expatrié ne part généralement pas seul, mais avec son conjoint et ses enfants : comment assurer la scolarisation ? comment gérer financièrement son foyer le temps que son conjoint retrouve un poste, trouve un nouvel emploi, passe une formation… ?

 

En synthèse, il s’agit d’accompagner le collaborateur dans sa réintégration globale : décalage culturel, vie sociale à reconstruire… D’une certaine façon, les expatriés, surtout de longue date, doivent réapprendre à vivre dans leur pays d’origine.

 

En tant qu’experts de l’assurance internationale, nous accompagnons depuis de nombreuses années des collaborateurs et leurs employeurs et sommes témoins des difficultés qu’ils peuvent rencontrer dans la gestion du retour, alors que beaucoup auraient pu être évitées avec une meilleure préparation. Mon conseil, tant pour le collaborateur que pour son employeur, c’est d’anticiper. On n’enverrait pas un collaborateur du jour au lendemain vivre deux ans à Hong Kong. De la même façon, on ne peut pas s’attendre à ce que ce même collaborateur revienne à son bureau d’origine du jour au lendemain, après plusieurs mois, voire plusieurs années passées à l’étranger. Il faut environ six mois pour évoquer avec le salarié tous les aspects du retour et proposer des réponses aux questions qui pourraient constituer des points de crispation une fois le collaborateur effectivement rentré. Des actions, pourtant simples, s’avèrent efficaces : sur le plan professionnel, organiser des entretiens de carrière sur place et désigner un « sponsor » chargé d’accompagner le collaborateur durant sa mission jusqu’à son retour ; sur le plan administratif, s’appuyer sur une société de relocation, qui facilitera la réinstallation du collaborateur; enfin, sur le plan social, il est toujours possible de proposer des séances de coaching pour le collaborateur et sa famille, ou une aide à la recherche d’emploi pour le conjoint. Dans tous les cas, le dialogue est clé.

 

En bref, le retour, comme le départ, se prépare et s’organise, autour d’une feuille de route claire. Et l’employeur est l’interlocuteur le plus légitime pour accompagner son collaborateur expatrié. D’ailleurs 43% des entreprises cherchent désormais à améliorer la gestion du retour d’expatriation dans le cadre de leur politique de gestion des talents [3]. A la clé : la possibilité de le fidéliser au sein de l’entreprise, d’exploiter au mieux ses (nouveaux) talents, et de se donner toutes les chances de préparer une future expatriation !

 

[1] Etude Mondissimo « Français du Royaume-Uni, quel avenir après le Brexit ? »

[2] Observatoire français de l’expatriation

[3] Talent Mobility Trend Survey – BGRS

 

Auteur : Isabelle Moins, Directeur Général d’APRIL International Care France.